Au Québec, parmi les adultes qui consultent chaque année pour une dépendance à l’alcool et aux drogues, 38 % sont parents d’enfants de 17 ans et moins (Bertrand et al., 2007). Une abondante littérature relate les impacts de la dépendance à l’alcool et aux drogues sur les compétences parentales. Notamment, un style parental autoritaire et punitif ainsi qu’une diminution de la chaleur, de la sensibilité (Solis et al., 2012), de la discipline et de l’engagement auprès de l’enfant (Laventure et al., 2018). La méta-analyse de Pierce et al. (2020) mentionne l’association entre l’abus de substances et les comportements violents de la part des parents. Les enfants de parents ayant une toxicomanie rapportant plus de blessures nécessitant des soins hospitaliers (Raitasalo et Holmila, 2017). La majorité des études en ce qui a trait à la parentalité se concentrent sur la mère et ainsi peu d’études s’intéressent à ce jour à la paternité (Pierce et al., 2020 ; Sokolovic et al., 2021). Cette mise à l’écart du rôle de père est aussi observée dans les services de traitements de la toxicomanie (Bell et al., 2020) et de la protection de la jeunesse (Roy, 2018 ; Pentecôte et al., 2016). On fait référence à une méconnaissance des compétences des pères qui engendre un questionnement face à leur utilité dans l’intervention (Williams, 2014), une priorisation du rôle de la mère et un faible niveau d’inclusion des pères dans les programmes d’éducation parentale (Barker et al., 2017). Néanmoins, le Plan d’action interministériel en dépendance 2018-2028 propose, d’une part, des actions comprenant une analyse différenciée entre les sexes (ADS). D’autre part, il souligne l’importance de tenir compte des groupes à besoins particuliers qui incluent les personnes présentant un trouble d’utilisation de substances (TUS) et les pères de jeunes enfants (Gouvernement du Québec, 2018). Le peu d’études à propos de la paternité en contexte de dépendance démontre que les pères désirent s’impliquer auprès de leurs enfants (Mc Mahon et al., 2008), veulent devenir de meilleurs parents (Stover et al., 2019) et éprouvent un plus faible niveau de satisfaction parental (McMahon et al., 2008 ; Rubenstein et Stover, 2016). Le sentiment d’auto-efficacité parentale chez les pères est un phénomène peu étudié à ce jour. Il est toutefois un levier important afin de favoriser l’engagement des pères dans leur rôle parental (Trahan, 2018).
Via une méthode qualitative, ce mémoire vise à documenter la manière dont les pères en traitement pour une dépendance à l’alcool et aux drogues perçoivent et expérimentent leur sentiment d’auto-efficacité parental. Ce projet de recherche s’inscrit dans l’étude d’évaluation du programme Cap sur la famille, un programme d’entraînement aux habiletés parentales qui comporte un volet destiné aux Autochtones du Québec, menée par les directrices de ce mémoire (Laventure, Letarte et Plourde, 2019-2020-2021).